Israël - Palestine : où est la voix de la France ?
Tribune de Marie-Françoise Bechtel, députée MRC de l'Aisne et 1ere
vice-présidente du MRC, parue dans l'Humanité, samedi 2 août 2014.
Notre pays avait
toujours su, du Général De Gaulle à Jacques Chirac en passant par François
Mitterrand, faire entendre la voix de la raison qui est celle d’un juste
équilibre entre les droits respectifs de deux peuples. Force est de le
constater aujourd’hui : le langage que tient notre diplomatie s’éloigne de plus
en plus de cet équilibre. L’approbation unilatérale donnée aux actions menées
par l’Etat d’Israël l’emporte manifestement sur notre soutien constant au droit
international. Ce ne sont pas les légères inflexions de notre langage
diplomatique, tardivement intervenues, qui changent le fond de cette politique
nouvelle.
Face à la gravité de l’escalade actuelle, la France ne pouvait pourtant s’exonérer de ses responsabilités historiques en se contentant d’accueillir une conférence internationale condamnée à la redite. A chaque étape d’un conflit qui, d’intifada en colonisation, de tirs de roquette en répliques militaires disproportionnées, ne cesse d’aggraver la situation, c’est une action énergique sous l’égide du conseil de sécurité et comportant les sanctions nécessaires qui devait être exigée. Notre pays ne peut davantage se limiter à prendre des mesures de police pour lutter contre une« importation du conflit » sur notre territoire. C’est au contraire sa frilosité dans la défense d’une solution juste, appuyée sur les moyens nécessaires, qui crée sur le terreau sur lequel se développent des ressentiments qui, à leur tour, ne peuvent qu’engendrer des comportements inacceptables et dangereux. Ce cercle vicieux n’existerait pas si la France n’avait, malgré le déséquilibre profond des belligérants, renvoyé ceux-ci dos à dos.
Face à la gravité de l’escalade actuelle, la France ne pouvait pourtant s’exonérer de ses responsabilités historiques en se contentant d’accueillir une conférence internationale condamnée à la redite. A chaque étape d’un conflit qui, d’intifada en colonisation, de tirs de roquette en répliques militaires disproportionnées, ne cesse d’aggraver la situation, c’est une action énergique sous l’égide du conseil de sécurité et comportant les sanctions nécessaires qui devait être exigée. Notre pays ne peut davantage se limiter à prendre des mesures de police pour lutter contre une« importation du conflit » sur notre territoire. C’est au contraire sa frilosité dans la défense d’une solution juste, appuyée sur les moyens nécessaires, qui crée sur le terreau sur lequel se développent des ressentiments qui, à leur tour, ne peuvent qu’engendrer des comportements inacceptables et dangereux. Ce cercle vicieux n’existerait pas si la France n’avait, malgré le déséquilibre profond des belligérants, renvoyé ceux-ci dos à dos.
La question va en effet très au-delà de l’indignation
sélective qui est la nôtre. Certes, la multiplication des pertes humaines et
notamment civiles vaut au moins la dénonciation que nous réservons à d’autres
situations de détresse dans le monde. Et nous ne sommes pas les seuls à
déplorer la politique du « deux poids, deux mesures ».
Mais ne pas agir sur les causes c’est se condamner à une répétition de la crise. A cet égard un premier devoir est de dire les choses telles qu’elles sont: nous n’en serions pas là si l’Etat d’Israël n’avait cessé de violer le droit international notamment par sa politique de colonisations illégales tout en s’attachant en coulisses à créer une situation dans laquelle il a, depuis Camp David, discrédité tous ses interlocuteurs. Le face-à-face d’Israël et du Hamas est tout sauf un hasard historique et le premier a beau jeu aujourd’hui de dire qu’il n’a pas en face de lui –ce qui est vrai- un interlocuteur crédible et responsable. Car la vérité est aussi qu’il a tout fait pour en arriver là, rendant quasiment impossible la création de deux Etats.
Un deuxième devoir est de rétablir l’équilibre. Les sanctions que la France est si prompte à demander dans d’autres cas doivent donc être prises et ce, sans attendre, à l’égard de l’Etat d’Israël. Sans cela, l’histoire ne pourra manquer de porter un jugement sévère sur la politique à géométrie variable de notre pays en matière de droits de l’homme et de respect du droit international.
C’est ce droit international qui doit rester la boussole de notre diplomatie. La résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies votée le 22 novembre 1967 contenait tout ce qui était nécessaire à l’établissement d’une paix juste et équilibrée.
Si la France s’est toujours distinguée comme une voix singulière au sein du camp occidental, la remise en cause de cette vocation est grave. D’une part ce conflit s’inscrit dans l’éclatement de toutes les zones de stabilité au Moyen-Orient, dont le risque avait été souligné par la France au moment de la guerre d’Irak. Dans cet embrasement généralisé figure la politique agressive d’un Etat soutenu au-delà du raisonnable par les puissances occidentales. D’autre part, la position de la France vis-à-vis des deux peuples lui donne une responsabilité historique particulière. Tout d’abord parce que notre pays a joué un rôle majeur dans la création de l’Etat d’Israël et, jusqu’à il y a peu d’années encore, apporté une attention particulière au conflit. Ensuite, parce que la France est le pays européen qui compte le plus de citoyens qui procèdent d'une culture juive et musulmane ; par la force de leur imaginaire culturel, nombreux sont ceux qui se sentent très concernés par le conflit.
Mais c'est précisément en assumant une position éclairée par le droit et la Raison que la République considère ses concitoyens juifs ou musulmans comme des citoyens français, dépositaires comme tous de notre indivisible citoyenneté, et non comme de potentiels "importateurs" du conflit.
Nous pensons que la France doit retrouver la voie de l’équilibre, laisser de côté tout unilatéralisme et revenir à sa diplomatie traditionnelle. Elle doit condamner clairement la violation du droit international par l’Etat d’Israël, agir pour que l’Europe dénonce ses accords d’association avec cet Etat et réclamer l’application de sanctions. L’espoir rendu au peuple palestinien l’aiderait à confier son destin à des partis et dirigeants responsables. Ou bien voulons-nous attendre l’écrasement du Hamas, ce guide aveugle d’un peuple désespéré, pour passer à l’étape ultime, celle d’un Al Qaida en Palestine ? Mais à qui la faute si les marches de l’enfer sont ainsi progressivement descendues ?
L’heure n’est plus à la rhétorique. Tout ce qu’il est encore possible de faire pour donner à la Palestine un Etat digne de ce nom doit être fait. Il y va de l’intérêt de deux peuples qui l’un et l’autre le méritent car ils ne peuvent être assimilés à leurs gouvernants. Il y va aussi de l’intérêt du Moyen-Orient tout entier ainsi que de l’Europe. Devant de tels enjeux, la France saura-t-elle retrouver une voix qui l’avait honorée ?
Mais ne pas agir sur les causes c’est se condamner à une répétition de la crise. A cet égard un premier devoir est de dire les choses telles qu’elles sont: nous n’en serions pas là si l’Etat d’Israël n’avait cessé de violer le droit international notamment par sa politique de colonisations illégales tout en s’attachant en coulisses à créer une situation dans laquelle il a, depuis Camp David, discrédité tous ses interlocuteurs. Le face-à-face d’Israël et du Hamas est tout sauf un hasard historique et le premier a beau jeu aujourd’hui de dire qu’il n’a pas en face de lui –ce qui est vrai- un interlocuteur crédible et responsable. Car la vérité est aussi qu’il a tout fait pour en arriver là, rendant quasiment impossible la création de deux Etats.
Un deuxième devoir est de rétablir l’équilibre. Les sanctions que la France est si prompte à demander dans d’autres cas doivent donc être prises et ce, sans attendre, à l’égard de l’Etat d’Israël. Sans cela, l’histoire ne pourra manquer de porter un jugement sévère sur la politique à géométrie variable de notre pays en matière de droits de l’homme et de respect du droit international.
C’est ce droit international qui doit rester la boussole de notre diplomatie. La résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies votée le 22 novembre 1967 contenait tout ce qui était nécessaire à l’établissement d’une paix juste et équilibrée.
Si la France s’est toujours distinguée comme une voix singulière au sein du camp occidental, la remise en cause de cette vocation est grave. D’une part ce conflit s’inscrit dans l’éclatement de toutes les zones de stabilité au Moyen-Orient, dont le risque avait été souligné par la France au moment de la guerre d’Irak. Dans cet embrasement généralisé figure la politique agressive d’un Etat soutenu au-delà du raisonnable par les puissances occidentales. D’autre part, la position de la France vis-à-vis des deux peuples lui donne une responsabilité historique particulière. Tout d’abord parce que notre pays a joué un rôle majeur dans la création de l’Etat d’Israël et, jusqu’à il y a peu d’années encore, apporté une attention particulière au conflit. Ensuite, parce que la France est le pays européen qui compte le plus de citoyens qui procèdent d'une culture juive et musulmane ; par la force de leur imaginaire culturel, nombreux sont ceux qui se sentent très concernés par le conflit.
Mais c'est précisément en assumant une position éclairée par le droit et la Raison que la République considère ses concitoyens juifs ou musulmans comme des citoyens français, dépositaires comme tous de notre indivisible citoyenneté, et non comme de potentiels "importateurs" du conflit.
Nous pensons que la France doit retrouver la voie de l’équilibre, laisser de côté tout unilatéralisme et revenir à sa diplomatie traditionnelle. Elle doit condamner clairement la violation du droit international par l’Etat d’Israël, agir pour que l’Europe dénonce ses accords d’association avec cet Etat et réclamer l’application de sanctions. L’espoir rendu au peuple palestinien l’aiderait à confier son destin à des partis et dirigeants responsables. Ou bien voulons-nous attendre l’écrasement du Hamas, ce guide aveugle d’un peuple désespéré, pour passer à l’étape ultime, celle d’un Al Qaida en Palestine ? Mais à qui la faute si les marches de l’enfer sont ainsi progressivement descendues ?
L’heure n’est plus à la rhétorique. Tout ce qu’il est encore possible de faire pour donner à la Palestine un Etat digne de ce nom doit être fait. Il y va de l’intérêt de deux peuples qui l’un et l’autre le méritent car ils ne peuvent être assimilés à leurs gouvernants. Il y va aussi de l’intérêt du Moyen-Orient tout entier ainsi que de l’Europe. Devant de tels enjeux, la France saura-t-elle retrouver une voix qui l’avait honorée ?
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